Analysis of Les villes

Emile Verhaeren 1855 (Sint-Amands) – 1916 (Rouen)



Oh ! ces villes, par l'or putride envenimées !
Clameurs de pierre et vols et gestes de fumées,
Dômes et tours d'orgueil et colonnes debout
Dans l'espace qui vibre et le travail qui bout,
En aimas-tu l'effroi et les affres profondes
O toi, le voyageur
Qui t'en allais triste et songeur
Par les gares de feu qui ceinturent le monde ?

Cahots et bonds de trains par au-dessus des monts !

L'intime et sourd tocsin qui enfiévrait ton âme
Battait aussi dans ces villes, le soir ; leur flamme
Rouge et myriadaire illuminait ton front,
Leur aboi noir, leur cri vengeur, leur han fécond
Etaient l'aboi, le cri, le han de ton coeur même ;
Ton être entier était tordu en leur blasphème,
Ta volonté jetée en proie à leur torrent
Et vous vous maudissiez tout en vous adorant.

Oh ! leurs élans, leurs chocs, leurs blasphèmes, leurs crimes
Et leurs meurtres plantés dans le torse des lois !
Le coeur de leurs bourdons, le front de leurs beffrois
Ont oublié le nombre exact de leurs victimes ;
Leur monstrueux amas barre le firmament ;
Le siècle et son horreur se condensent en elles,
Mais leur âme contient la minute éternelle
Qui date, au long des jours innombrables, le temps.

D'âge en âge l'histoire est fécondée
Sous l'afflux d'or de leur idées ;
Leur moelle et leur cerveau
Se ravivent du sang nouveau
Qu'infuse au monde vieux l'espoir ou le génie.

Elles illuminent l'audace et communient
Avec l'espace et fascinent les horizons.
Leur magnétisme est fort comme un poison.
Tout front qui domine les autres,
Savant, penseur, poète, apôtre,
Mêle sa flamme à la lueur de leurs brasiers.
Elles dressent vers l'inconnu les escaliers
Par où monte l'orgueil des recherches humaines
Et broient, sous leurs pieds clairs, l'erreur qui tend ses chaînes
De l'univers à l'homme et des hommes à Dieu.

Avez-vous vu, le soir, leurs couronnes de feu,
Temples de verre et d'or assis sur les collines,
D'où se braquent vers les étoiles sybillines
Les monstrueux regards des lentilles d'airain ?
Et puis, en des quartiers silencieux, soudain,
Avez-vous visité les hauts laboratoires
Où l'on poursuit, de calcul en calcul,
De chaînon en chaînon, de recul en recul,
A travers l'infini, la vie oscillatoire ?

L'homme qui juge, pense et veut,
S'y contrôle et s'y mesure soi-même.
Tous les secrets, tous les problèmes,
Depuis cent ans y sont l'enjeu
D'une lutte géante avec la destinée.
Combats méticuleux et science acharnée !
L'énigme est là, dont on cherche les yeux
Et qu'on frôle toujours, comme une bête hagarde,
Pour épier l'instant prodigieux,
Où, tout à coup, ces yeux vaincus se dardent,
Refoulant l'ombre et dévoilant la vérité.
Alors, les vents, les flots, la nuit, les cieux, les astres,
Les ponts massant sous eux les blocs de leurs pilastres,
Les basaltes du port, les murs de la cité
Pourraient frémir, aux quatre coins de l'étendue,
Qu'ils ne trembleraient pas d'un plus profond bonheur
Que l'âme ardente du chercheur,
Sur sa conquête suspendue !

Quelque chose du monde est tout à coup changé,
Par ce jaillissement brutal hors des ténèbres ;
Il n'importe qu'on nie ou qu'on célèbre
L'homme dont le génie a saccagé
Les mystères barrés par des portes hostiles,
Sa force est résorbée en la force des villes
Et leur énorme vie en est encor grandie !

Ainsi, de laps en laps, ceux qui pensent dédient
A l'avenir humain l'ardeur de leur cerveau ;
Et tandis qu'ils vivent pour des pensers nouveaux,
D'autres qui travaillent pour les foules - se lèvent.

Ceux-ci sont les ardents et les martyrs du rêve
Qu'ils entrevoient, là-bas, par des jardins de sang,
Marcher, pour aboutir au seuil resplendissant
Des temps où la justice aura dompté les hommes.
L'erreur a promulgué des lois, noirs axiomes,
Qu'on doit ronger sans cesse, en attendant le jour
De les casser à coups d'émeute ou de révolte ;
S'il faut le rouge engrais pour les pures récoltes,
S'il faut la haine immense avant l'immense amour,
S'il faut le rut et la folie aux coeurs serviles,
Les bonds des tocsins noirs soulèveront les villes
En hurlante marée, autour des droits nouveaux.

Et dans les halls blafards des vieux faubourgs, là-haut,
Où les lueurs du gaz illimitent les gestes,
Les voix, les cris, les poings des tribuns clairs attestent
Que les besoins de tous sont le cercle du droit.
Textes, règles, codes, tables, bibles, systèmes,
Mots solennels qu'on débite à faux poids :
L'homme, dans l'univers n'a qu'un maître, lui-même,
Et l'univers entier est ce


Scheme AABBACCB X DDBBDDBB XXAABAEX DAFFD BXGACAAAAB FAAGGXEEC BDAXDDABABBAABBCCB HACHAAB BFAB DHBXACBACAAA BABBAADA
Poetic Form
Metre 111111111 11011111111 11111111 1111100111 11111111 1101 11101111 111111101 1111111111 111111111 111110111 111111 1111111111 11010111111 111111111 111111110 11111111 1111111111 11111101110 0111101111 110101111 1111001 0111111111 11111101 111111101 1111101111 1111111 11111 11111 10111111011 11111 11111010 1110111110 11101011 0111111 101111111 111111 11101111 111111111111 11111111 111011111 1011111111 11111111 1101111 1111111 111011010 11111111 1111111111 0101111 1111111 11101111111 11101111 111111 1111011101 011111011 1101111111 11110111111 111101 11111111 11111111 11111111111 1111111111 111111111 111111111 111111111 111111 11111 111101111 1111011111 11111111111 11101101 111111111 110111111111 111110111 1111111111 0111111 11111111 111111111 111111110111 111111111 1011111 11111010111 10111011 111111101001 1111111111 11101111111 1111101011011 11101111111 111111111 11111111 1111111111 11111111 1111111111 1111110111 1111101011 11111111 11111011111011 111011
Closest metre Iambic heptameter
Characters 4,449
Words 734
Sentences 26
Stanzas 12
Stanza Lengths 8, 1, 8, 8, 5, 10, 9, 18, 7, 4, 12, 8
Lines Amount 98
Letters per line (avg) 34
Words per line (avg) 8
Letters per stanza (avg) 279
Words per stanza (avg) 63
Font size:
 

Submitted on May 13, 2011

Modified on March 05, 2023

3:58 min read
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Emile Verhaeren

Emile Verhaeren was a Belgian poet who wrote in the French language, and one of the chief founders of the school of Symbolism. more…

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    "Les villes" Poetry.com. STANDS4 LLC, 2024. Web. 29 Apr. 2024. <https://www.poetry.com/poem-analysis/11319/les-villes>.

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