Analysis of Le chant de l'eau

Emile Verhaeren 1855 (Sint-Amands) – 1916 (Rouen)



L'entendez-vous, l'entendez-vous
Le menu flot sur les cailloux ?
Il passe et court et glisse
Et doucement dédie aux branches,
Qui sur son cours se penchent,
Sa chanson lisse.

Là-bas,
Le petit bois de cornouillers
Où l'on disait que Mélusine
Jadis, sur un tapis de perles fines,
Au clair de lune, en blancs souliers,
Dansa ;
Le petit bois de cornouillers
Et tous ses hôtes familiers
Et les putois et les fouines
Et les souris et les mulots
Ecoutent
Loin des sentes et loin des routes
Le bruit de l'eau.

Aubes voilées,
Vous étendez en vain,
Dans les vallées,
Vos tissus blêmes,
La rivière,
Sous vos duvets épais, dès le prime matin,
Coule de pierre en pierre
Et murmure quand même.
Si quelquefois, pendant l'été,
Elle tarit sa volupté
D'être sonore et frémissante et fraîche,
C'est que le dur juillet
La hait
Et l'accable et l'assèche.
Mais néanmoins, oui, même alors
En ses anses, sous les broussailles
Elle tressaille
Et se ranime encor,
Quand la belle gardeuse d'oies
Lui livre ingénument la joie
Brusque et rouge de tout son corps.

Oh ! les belles épousailles
De l'eau lucide et de la chair,
Dans le vent et dans l'air,
Sur un lit transparent de mousse et de rocailles ;
Et les baisers multipliés du flot
Sur la nuque et le dos,
Et les courbes et les anneaux
De l'onduleuse chevelure
Ornant les deux seins triomphaux
D'une ample et flexible parure ;
Et les vagues violettes ou roses
Qui se brisent ou tout à coup se juxtaposent
Autour des flancs, autour des reins ;
Et tout là-haut le ciel divin
Qui rit à la santé lumineuse des choses !

La belle fille aux cheveux roux
Pose un pied clair sur les cailloux.
Elle allonge le bras et la hanche et s'inclina
Pour recueillir au bord,
Parmi les lotiers d'or,
La menthe fine ;
Ou bien encor
S'amuse à soulever les pierres
Et provoque la fuite
Droite et subite
Des truites
Au fil luisant de la rivière.

Avec des fleurs de pourpre aux deux coins de sa bouche,
Elle s'étend ensuite et rit et se recouche,
Les pieds dans l'eau, mais le torse au soleil ;
Et les oiseaux vifs et vermeils
Volent et volent,
Et l'ombre de leurs ailes
Passe sur elle.

Ainsi fait-elle encor
A l'entour de son corps
Même aux mois chauds
Chanter les flots.
Et ce n'est qu'en septembre
Que sous les branches d'or et d'ambre,
Sa nudité
Ne mire plus dans l'eau sa mobile clarté,
Mais c'est qu'alors sont revenues
Vers notre ciel les lourdes nues
Avec l'averse entre leurs plis
Et que déjà la brume
Du fond des prés et des taillis
S'exhume.

Pluie aux gouttes rondes et claires,
Bulles de joie et de lumière,
Le sinueux ruisseau gaiement vous fait accueil,
Car tout l'automne en deuil
Le jonche en vain de mousse et de feuilles tombées.
Son flot rechante au long des berges recourbées,
Parmi les prés, parmi les bois ;
Chaque caillou que le courant remue
Fait entendre sa voix menue
Comme autrefois ;
Et peut-être que Mélusine,
Quand la lune, à minuit, répand comme à foison
Sur les gazons
Ses perles fines,
S'éveille et lentement décroise ses pieds d'or,
Et, suivant que le flot anime sa cadence,
Danse encor
Et danse.


Scheme aaaxba aAcdaaAaaabxe fcfagchibbgbbgaaejakj ahhabxagagxbxca aacbjcjabbag llxabxx jjaaggbbxaaiax ageeffkicaccadjxja
Poetic Form
Metre 1111 0101111 111111 1111110 111111 111 11 010111 1111111 1111111 1111111 1 010111 111111 111111 1110111 1 1111111 01111 111 1111 1111 1111 111 111111011 1101101 11111 111011 1111 111111111 11011 11 111111 1111111 111111 11 1111 11111 1011111 1111111 1111 11111111 1011111 11101011111 1111111 111101 111111 111 11111 11011001 1111110 11111111 111111 1111011 1111111 111111 1111111 110111111 1111 1111 111 111 101111 1111 111 11 1111111 11111111111 111111111 11111101101 111111 111 11111 111 1111 01111 11111 111 11101111 11110111 11 1111111101 111110 1101111 11011011 111111 11111111 101 111111 1111111 0111111 11111 01111111111 1111111011 1111111 1110101 1010111 11 111111 11111111 111 111 111111111 111011110 11 11
Closest metre Iambic tetrameter
Characters 3,030
Words 538
Sentences 16
Stanzas 8
Stanza Lengths 6, 13, 21, 15, 12, 7, 14, 18
Lines Amount 106
Letters per line (avg) 22
Words per line (avg) 5
Letters per stanza (avg) 291
Words per stanza (avg) 68
Font size:
 

Submitted on May 13, 2011

Modified on March 05, 2023

2:51 min read
86

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren was a Belgian poet who wrote in the French language, and one of the chief founders of the school of Symbolism. more…

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    "Le chant de l'eau" Poetry.com. STANDS4 LLC, 2024. Web. 28 Apr. 2024. <https://www.poetry.com/poem-analysis/11226/le-chant-de-l%27eau>.

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