Analysis of Aux proscrits
Victor Marie Hugo 1802 (Besançon) – 1885 (Paris)
EN PLANTANT LE CHÊNE DES ÉTATS-UNIS D'EUROPE
DANS LE JARDIN DE HAUTEVILLE HOUSE
LE 14 JUILLET 1870
Semons ce qui demeure, ô passants que nous sommes !
Le sort est un abîme, et ses flots sont amers,
Au bord du noir destin, frères, semons des hommes,
Et des chênes au bord des mers !
Nous sommes envoyés, bannis, sur ce calvaire,
Pour être vus de loin, d'en bas, par nos vainqueurs,
Et pour faire germer par l'exemple sévère
Des coeurs semblables à nos coeurs.
Et nous avons aussi le devoir, ô nature,
D'allumer des clartés sous ton fauve sourcil,
Et de mettre à ces rocs la grande signature
De l'avenir et de l'exil.
Sachez que nous pouvons faire sortir de terre
Le chêne triomphal que l'univers attend,
Et faire frissonner dans son feuillage austère
L'idée au sourire éclatant.
La matière aime et veut que notre appel l'émeuve ;
Le globe est sous l'esprit, et le grand verbe humain
Enseigne l'être, et l'onde, et la sève, et le fleuve,
Qui lui demandent leur chemin.
L'homme, quand il commande aux flots de le connaître,
Aux mers de l'écouter dans le bruit qu'elles font,
A la terre d'ouvrir son flanc, aux temps de naître,
Est un mage immense et profond.
Ayons foi dans ce germe ! Amis, il nous ressemble.
Il sera grand et fort, puisqu'il est faible et nu.
Nous sommes ses pareils, bannis, nous en qui tremble
Tout un vaste monde inconnu !
Nous fûmes secoués d'un arbre formidable,
Un soir d'hiver, à l'heure où le monde est puni,
Nous fûmes secoués, frères, dans l'insondable,
Dans l'ouragan, dans l'infini.
Chacun de nous contient le chêne République ;
Chacun de nous contient le chêne Vérité ;
L'oreille qui, pieuse, à nos malheurs s'applique,
T'entend sourdre en nous, Liberté !
Tu nous jettes au vent, Dieu qui par nous commences !
C'est bien. Nous disperser, ô Dieu, c'est nous bénir !
Nous sommes la poignée obscure des semences
Du sombre champ de l'avenir.
Et nous y germerons, n'en doutez pas, mes frères,
Comme en ce sable, au bord des flots prompts à s'enfler,
Croîtra, parmi les flux et les reflux contraires,
Ce gland, sur qui Dieu va souffler !
O nature, il s'agit de faire un arbre énorme,
Mouvant comme aujourd'hui, puissant comme demain,
Figurant par sa feuille et sa taille et sa forme
La croissance du genre humain !
Il s'agit de construire un chêne aux bras sans nombre,
Un grand chêne qui puise avec son tronc noueux
De la nuit dans la terre et qui force cette ombre
A s'épanouir dans les cieux !
Il s'agit de bâtir cette oeuvre collective
D'un chêne altier, auguste, et par tous conspiré,
L'homme y mettant son souffle et l'océan sa rive,
Et l'astre son rayon sacré !
Nature, que je sens saigner par nos fêlures,
Dont l'âme est le foyer où nous nous réchauffons,
Et dont on voit la nuit les vagues chevelures
Flotter dans les souffles profonds,
Nous confions cet arbre à tes entrailles, mère !
Fais-le si grand, qu'égal aux vieux cèdres d'Hébron,
Il ne distingue pas l'aigle de l'éphémère
Et la foudre du moucheron ;
Et qu'un jour le passant, quand luira l'aube calme
De l'affranchissement des peuples sous les cieux,
Croie, en le voyant, voir la gigantesque palme
De cet effort prodigieux !
Nous te le confions, plage aux voix étouffées.
O sinistre océan, nous te le confions ;
Nous confions le chêne adoré des Orphées
Aux flots qu'aimaient les Amphions !
Nuages, firmaments, pléiades protectrices,
Écumes, durs granits, sables craints des sondeurs,
Nous vous le confions ; et soyez ses nourrices,
Ténèbres, clartés, profondeurs !
Vents, vous travaillerez à ce travail sublime ;
O vents sourds, qui jamais ne dites : c'est assez !
Vous mêlerez la pluie amère de l'abîme
A ses noirs cheveux hérissés.
Vous le fortifierez de vos rudes haleines ;
Vous l'accoutumerez aux luttes des géants ;
Vous l'effaroucherez avec vos bouches pleines
De la clameur des océans.
Et vous lui porterez, vents, du fond des campagnes,
Vents, vous lui porterez du fond des vastes eaux,
Le frisson des sapins de toutes les montagnes
Et des mâts de tous les vaisseaux.
Afin qu'il soit robuste, invincible, suprême,
Et qu'il n'ait peur de rien au bord de l'infini!
Afin qu'étant bâti par les destructeurs même,
Des maudits même il soit béni !
Afin qu'il soit sacré pour la mer sa voisine,
Que sa rumeur s'effeuille en ineffables mots,
Et qu'il grandisse, ayant la nu
Scheme | X A B AAXX CACA CDCD CBCB EFEF CBCB DFDF DFDF GBGB XCAC XCAC HFHF CACA ECEC XAAA CFCF HAHA IAIA AAAA HAHI AXAA AXAA HFHF FXF |
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Poetic Form | |
Metre | 11011111110 1010111 01 11111111 010111111111 11111011111 11111111 111011111 11111111111 1111011111 11111 11110110 11111111 1111111100 11111 111111110 01111101 11111111 111111 1111111101011 0101110110111 111111111101 110111 11111111011 1111110111 011011111111 01110111 1111110111 110111101111 1111111110 11111 111111111000 1111101011 111111111 1111 111101111 111101111 111111 111110 111111111010 111111111 111110111 11111 11111111111 11110111111 111111111 1111111 1101111111 111011101 1111111111 111101 11111111111 1111111111 111111011111 011111 11111110010 1111100101111 111110111111 111101 1011111111 1110101011111 111111111 11111 11111111 1011111111111 11111111111 11111 11110111111 1111111 11011111 11101 110111111 11111101 1101101111 11111 11111 11110111 11011111 111111 11110101 111111111 11111111111 0111111 1011111 1111111 111111 111111 1110111111 1110111111 01111111 111111111 11111010011 11111111111 1111111111 11111111 11111111101 1111111 1111111 |
Closest metre | Iambic hexameter |
Characters | 4,313 |
Words | 724 |
Sentences | 33 |
Stanzas | 27 |
Stanza Lengths | 1, 1, 1, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 4, 3 |
Lines Amount | 98 |
Letters per line (avg) | 33 |
Words per line (avg) | 8 |
Letters per stanza (avg) | 119 |
Words per stanza (avg) | 28 |
Font size:
Submitted on May 13, 2011
Modified on March 05, 2023
- 3:55 min read
- 78 Views
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Style:MLAChicagoAPA
"Aux proscrits" Poetry.com. STANDS4 LLC, 2024. Web. 19 May 2024. <https://www.poetry.com/poem-analysis/37634/aux-proscrits>.
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